Le 28 mars 2023, une page entière dans le Monde était consacrée à la politique (anti-) vélo de Fontenay-aux-Roses. C’est un enjeu qui dépasse le vélo, car il concerne aussi l’autonomie de nos enfants, de nos séniors, des personnes handicapées et la liberté de déplacement de tous les habitants de notre ville. Pour celles et ceux qui n’ont pas d’abonnement au Monde, je liste 10 positions exprimées par le maire, Laurent Vastel (UDI), et j’y réponds.
1/ « Je fais assez pour le vélo, pas besoin de faire plus »
Vastel mentionne ses mesures pro-vélo : 4 stations de Vélib’, une consigne Véligo à la gare, une école municipale du vélo et 267 arceaux (soit moins d’1% de l’espace dédié au stationnement automobile). Cela suffit pour lui. Ces actions sont louables mais ratent l’essentiel : la sécurité routière. Les élèves de la vélo-école ne pourront jamais faire de vélo sur la route car M. Vastel refuse de créer une piste cyclable continue notamment sur la RD63 (avenue Dolivet), l’axe principal pour rejoindre Paris. Et ce, alors qu’il l’avait promis noir sur blanc pendant sa campagne pour les législatives. Une politique qui s’oppose à la création de pistes cyclables sur une route départementale est une politique ouvertement anti-vélo.
2/ « Pas besoin de pistes car la ville est déjà à 30 km/h »
C’est faux. Le Cerema, l’agence nationale qui conseille des collectivités en matière d’aménagement urbain, conseille de protéger les cyclistes avec des pistes au-delà de 4.000 véhicules par jour. Sur les routes départementales comme la RD63, le flux représente 3 fois plus. Il faut donc absolument des pistes pour permettre aux habitants de prendre le vélo sereinement.
3/ « Il n’y a pas de place pour le vélo car les SUV doivent stationner en surface »
Vastel précise sa vision pour l’espace public : « les voitures ont besoin de stationner sur l’espace public, puisque, avec l’augmentation de la taille des voitures, elles ne rentrent plus dans les garages ». Il assume donc la distribution gratuite de notre espace public aux propriétaires qui ne souhaitent pas acheter un véhicule adapté à la taille de leur garage. Une réaction sur twitter analyse finement le problème : « J’ai acheté un lit King size. Mais je viens de m’apercevoir que ma chambre est trop petite. J’exige qu’on m’installe une chambre supplémentaire sur l’espace public !! ».
4/ « La banlieue n’est pas l’endroit le plus favorable pour le vélo. »
C’est faux. C’est au contraire en banlieue que le vélo a toute sa pertinence. Premièrement, les transports en commun n’y seront jamais aussi développés qu’à Paris, et il faut donc des alternatives efficaces. Deuxièmement, 60% des trajets en voiture sont inférieurs à 3 km, soit seulement 12 minutes à vélo. Sans parler des embouteillages sur la RD63 qui rendent la vie des habitants, y compris dans les bus, difficile. Une piste cyclable leur donnerait une liberté de déplacement parfaite, gratuite, bonne pour la santé et pour le climat, et accessible à tous.
5/ « Le vélo n’a pas d’impact. »
Pour M. Vastel le vélo relève du loisir et pas du transport : « Je ne suis pas sûr que son impact soit si considérable ». C’est faux : depuis l’installation des coronapistes sur les grands axes de notre territoire comme la RD906 et la RD920 leur fréquentation est passée de 2% à 20% pour la RD906. Aucun mode de transport ne connaîtra une hausse si spectaculaire, qui montre que l’envie est là mais qu’il manque juste des pistes cyclables. L’effet de masse critique fonctionne déjà : on y croise même des enfants à vélo désormais.
6/ « Il n’y a pas de problème de pollution »
Dans l’article et sur twitter M. Vastel s’agace ouvertement des messages sur la pollution, car « la qualité de l’air n’a cessé de s’améliorer depuis trente ans ». Pourtant le problème reste grave : 6.000 personnes meurent prématurément chaque année dans notre région, notamment ceux qui habitent proche des axes pollués.
7/ « On ne peut pas faire passer le réseau cyclable régional RER V »
C’est faux. D’abord, le réseau et son axe RD63 ont été validés par la Région, le Département et par notre Territoire Vallée Sud Grand Paris, où M. Vastel siège en tant que vice-président et donc co-décideur. Etrangement il refuse sa propre décision explicitement par ailleurs. Ses arguments ne tiennent pas : accueillir la ligne V8, selon lui, « renforcerait la coupure urbaine, sacrifierait 200 arbres et bien trop de places de stationnement ». C’est faux. Les places de stationnement à supprimer ont déjà été créées par M. Vastel devant le gymnase. Et la mise en sens unique de la route dégagerait l’espace nécessaire pour une piste cyclable confortable. La question n’est pas « vélo contre arbres et stationnement » mais « comment aménager la route pour que chaque habitant puisse s’y déplacer à pied, à vélo et en voiture en sécurité ? ».
8/ « L’insécurité routière pour les habitants à vélo n’est pas un problème »
C’est faux et très problématique. M. Vastel assume explicitement la mise en danger des habitants à vélo qui ne seront pas protégés par une piste cyclable : « il en convient, les vélotaffeurs reviendront de manière un peu moins sécurisée ». Les images sont pourtant sans appel : aucun enfant ou néo-cycliste ne fera du vélo sur l’avenue Jean Moulin (RD63).
9/ « Les cyclistes sont un problème car ils roulent à 40 km/h »
Vastel déclare : « Je ne veux pas, dans une zone centrale de notre ville, d’une autoroute pour cyclistes qui vont travailler à 40 kilomètres-heure ». Cette image est caricaturale : le vélo serait un problème car il roule à 40 ? Ce qui rend nos villes impraticables à vélo est la vitesse des automobiles, mais M. Vastel l’assume et valide même les excès de vitesse. Il a déclaré à la télévision qu’il considère « secondaire » que les voitures roulent à 40 km/h dans sa ville 30 car « ça fonctionne », alors que dans le même reportage les habitants se plaignent des excès de vitesse.
10/ « Les cyclistes sont des extrémistes »
M. Vastel caricature les citoyens qui demandent simplement la possibilité de se déplacer à vélo en sécurité en plus de la voiture. En conseil municipal il répond à une demande pro-vélo : « je suis contre les extrêmes ». A la journaliste du Monde, il parle « des écologistes, ces extrémistes chantres d’une décroissance qui ne peut exister que par le collectivisme ». Ils mènent, selon lui, « une guerre antivoiture en voulant supprimer toutes les places de parking ». Il répète cette caricature fausse partout, même dans le Fontenay Magazine du mois d’avril en réponse à l’article dans le monde : « Nous poursuivrons une ligne mesurée de partage de l’espace public entre vélos et voitures, malgré les incantations de certains qui voudraient une piste cyclable sécurisée dans chaque rue, en supprimant à chaque fois 50% des places de stationnement ». C’est faux. Premièrement, on ne peut pas mélanger les vélos et voitures sur une route départementale où passent 12.000 véhicules par jour. Deuxièmement, demander une piste cyclable sur une route dangereuse ne signifie pas mettre des pistes cyclables dans chaque rue. Ce qui est problématique n’est pas que M. Vastel refuse une piste cyclable, mais qu’il refuse le débat démocratique en caricaturant systématiquement son interlocuteur, au détriment de la liberté de déplacement de nos enfants.
Conclusion
L’article dans le Monde a eu le mérite de présenter la politique anti-vélo de Fontenay-aux-Roses à la France entière. C’est utile, car dans le débat sur le futur de nos villes et de nos mobilités il est important de partir d’exemples concrets. Personnellement j’espère que ce débat fera évoluer M. Vastel vers une vision qui ne considère plus le vélo comme un problème mais comme une solution.
Dans sa réaction, publiée par un de ses porte-parole sur son site-web, M. Vastel montre pour l’instant son envie de renforcer son refus du vélo. Sur twitter il salue « un article clairvoyant », et son (propre) « courage de résister aux injonctions inquisitrices anti-voitures ». Fortement agacé par les remarques pro-vélo de la conseillère départementale Astrid Brobecker, il répond en résumant son bilan en « copier-coller des PV de l’assemblée départementale sur le site de l’opposition et aux photos de ses inspirations culinaires ou de ses nombreux week-ends qu’elle partage sur internet ». Il y critique même ses partisans UDI en dévoilant qu’en privé ils seraient anti-vélo aussi, alors que les maires UDI de Sceaux (Philippe Laurent) et de Massy (Nicolas Samsoen) mènent au contraire une politique pro-vélo depuis longtemps.
Si vous voulez pouvoir vous déplacer en sécurité à vélo en Vallée Sud Grand Paris, je vous conseille de parler et d’écrire à M. Vastel ici : lemaire@fontenay-aux-roses.fr. Vous pouvez aussi adhérer à l’association FARàVélo (ici) qui propose depuis 2019 un plan vélo pour une ville cyclable. Si vous souhaitez continuer à être témoin des déclarations de M. Vastel au conseil muncipal, signez la pétition pour le maintien de sa vidéo-diffusion (ici).
Stein van Oosteren
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« Nous sommes en démocratie »: Pourquoi un plaidoyer en faveur d’une ville accessible (aussi) à vélo serait une atteinte à la démocratie ? La démocratie veut dire le contraire : le droit d’exprimer le souhait que chaque enfant doit avoir la liberté de se déplacer partout de façon autonome à pied ou à vélo. Surtout que le droit à la mobilité active est un droit humain fondamental.
« Il y a des accidents à vélo » : c’est pour ça justement que beaucoup de citoyens demandent des pistes cyclables. Vous pointez le problème pour lequel nous demandons une solution.
« Des vélos ne peuvent pas aller dans des rues étroites, tournicotantes et avec de forts dénivelé » : une rue étroite est au contraire plus favorable à la présence humaine (piétons/vélos) qu’à un flux de véhicules intense. Si la taille et la forme des rues était un obstacle pour devenir cyclables, Amsterdam ne serait jamais devenu la capitale du vélo : les rues y sont si petites parfois qu’il n’y a même pas de trottoir. Ce sont des espaces où l’on se déplace en voiture, mais beaucoup plus à pied ou à vélo. Quant au dénivelé : depuis qu’on a inventé le vélo électrique le monde est devenue plat.
Nous sommes en démocratie. Les pro vélos sont ils plus nombreux que les gens qui préfèrent un mix des mobilités ? J’en doute. Beaucoup de gens ont peur à vélo et peur surtout des autres cyclistes qui font souvent n’importe quoi. C’est mon cas. J’ai connu trop de gens victimes d’accidents à vélo.
Enfin, voyez-vous des milliers de cyclistes sur nos routes et dans nos rues étroites, tournicotantes et avec de forts dénivelés ?
Bonjour,
Beaucoup de personnes ont peur de conduire une voiture et surtout peur de se faire renverser par une voiture. En tant que papa je ne lâche jamais la main de mes enfants à qui j’interdis de courir en leur criant dessus “attention aux voitures” tous les 10m. Il n’y a pas plus d’accidents car il y a terreur de la voiture qui est rentrée dans les moeurs.
C’est malheureux car la ville serait tellement plus agréable avec plus d’espace dédié aux piétons et aux cyclistes.
Merci Georges pour ce témoignage qui montre qu’à FAR l’espace public est trop hostile pour permettre aux enfants de se déplacer seul. Ce n’est pas normal ni acceptable. Des solutions pour apaiser l’espace public existent: sécuriser la marche et le vélo. Je propose par conséquent de ne pas conclure que c’est “malheureux” et de laissant faire M. Vastel dont la politique vise clairement à (i) faire taire les associations qui souhaitent participer activement à la gestion de leur ville, et à (ii) bloquer tout projet qui sécuriserait le passage de vélos sur notre axes routier départemental principal. Pour agir, il est indispensable de s’exprimer et de parler et d’écrire à M. Vastel: Laurent.vastel@fontenay-aux-roses.fr. S’il vous plaît faites-le, pour nos enfants et notre avenir à tous.
“Un mix des mobilités” est une expression qui me paraît dissimuler le tout-voiture.
Cela signifie sans doute que chacun pourrait rouler comme il l’entend avec le véhicule de son choix ( ou en marchant). Mais pour qu’il soit vraiment possible de marcher et de faire du vélo en toute sécurité, il faut restreindre un peu l’usage de la voiture (sens uniques, strictes limitations de vitesse avec tolérance 0 pour les dépassements, etc). La liberté de circulation des voitures dans la ville à 50 km/h, c’est la liberté du renard dans le poulailler
Bien dit. La formule “il faut tous partager la route” est généralement utilisée par des politiques qui ne veulent rien faire pour offrir réellement aux automobilistes la liberté de prendre parfois le vélo. Le maire de Fontenay-aux-Roses L. Vastel en est le parfait exemple: il veut bien mettre du stationnement vélo, des stations Vélib’ et créer une école vélo, mais il oublie l’essentiel: sécuriser la route pour que tous ces vélos puissent circuler en sécurité. Il va même jusqu’à déclarer à la télévision que dans notre ville 30, ce n’est pas un problème si les voitures roulent à 40. Bref, il faut une approche différente pour notre ville qui consiste à décourager la vitesse motorisée (au lieu de l’encourager comme M. Vastel) pour encourager la marche, le vélo et surtout la qualité de vie. Témoignage: https://twitter.com/LCyclable/status/1644694889949458437