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Le projet de loi sur le Climat jugé sévèrement par la Convention Citoyenne pour le Climat

Nous avions fait un article précédent pour Le bilan très mitigé de la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC), pour les propositions retenues pour le Gouvernement

Maintenant le projet de loi est déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale et va être discuté prochainement par les députés.

Quel est L’essentiel du projet de loi ?

Source : site Vie Publique : https://www.vie-publique.fr/loi/278460-loi-climat-et-resilience-convention-citoyenne-climat

Il comporte 69 articles que l’on peut télécharger : projet_de_loi_climat-complet

Faire évoluer les modes de consommation et l’alimentation

Les habitudes de consommation, voire de surconsommation, ont un impact important sur l’environnement. Un affichage climat, appelé “CO2-score“, va être mis en place, après expérimentations, afin d’informer les consommateurs sur l’impact carbone des produits et services.

La publicité en faveur des énergies fossiles sera interdite et des codes de bonne conduite seront signés avec les entreprises pour qu’elles s’engagent à faire évoluer leur publicité en prenant en compte les enjeux climatiques. Les pouvoirs des maires pour règlementer les espaces publicitaires seront renforcés.

Pour développer le vrac, un objectif de 20% de la surface de vente consacrée à partir de 2030 à la vente en vrac dans les grandes et moyennes surfaces est fixé. S’agissant du recyclage, les producteurs pourront mettre en place des dispositifs de consigne pour les emballages en verre à partir de 2025.

Sur les sujets de l’alimentation et des pratiques agricoles, les collectivités locales volontaires pourront expérimenter pendant deux ans un menu végétarien quotidien dans les cantines à partir de septembre 2021 et avant une éventuelle généralisation. D’ici 2025, la restauration collective privée (restaurant d’entreprise par exemple) aura l’obligation de proposer 50% de produits de qualité, dont 20% de bio. Dans la restauration collective publique (les cantines scolaires, les Ephad…), cette obligation est déjà fixée par la loi dite “EGAlim” de 2018 au 1er janvier 2022. Une trajectoire de réduction des émissions dues aux engrais agricoles azotés est prévue, avec le déclenchement d’une taxe à partir de 2024 si les objectifs ne sont pas tenus.

Modifier les modèles de production et de travail

Il s’agit d’accélérer le verdissement de l’économie et d’adapter la gouvernance de l’emploi à la transition écologique.

La stratégie nationale de la recherche va être alignée sur la stratégie nationale bas carbone. Les clauses environnementales des marchés publics sont durcies. En matière de dialogue social, la transition écologique figurera à l’avenir parmi les attributions générales des comités sociaux et économiques (CSE). Chaque thématique faisant l’objet d’une procédure d’information et de consultation du CSE devra prendre en compte les conséquences environnementales des activités de l’entreprise.

Pour protéger les écosystèmes, plusieurs dispositions du code minier sont modifiées. En outre, le gouvernement est habilité à réformer ce code en vue de développer un modèle extractif responsable.

Le développement de l’énergie décarbonée est accompagné : déclinaison de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) en objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables, extension de l’obligation d’installer des systèmes de production d’énergies renouvelables (photovoltaïque…) ou des toitures végétalisées sur les surfaces commerciales, …

Transformer les déplacements

Le projet de loi complète le mouvement engagé par la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités par :

  • la création de zones à faibles émissions (ZFE) pour les agglomérations de plus de 150 000 habitants d’ici fin 2024 ;
  • l’obligation pour les régions de proposer des tarifs attractifs sur les trains régionaux ;
  • l’interdiction des vols domestiques quand une alternative en train existe en moins de 2h30 et la compensation des émissions de 100% des vols intérieurs par les compagnies en 2024 afin d’encourager le recours au train plutôt qu’à l’avion ;
  • l’expérimentation de voies réservées à certaines catégories de véhicules (transports en commun, covoiturage, véhicules à très faibles émissions) ;
  • la possibilité pour les régions de créer une écotaxe routière (par une ordonnance)
  • la fin de la vente des véhicules les plus polluants (émettant plus de 123g CO2/km) en 2030.

Agir sur l’habitat et l’occupation de l’espace

La rénovation écologique des bâtiments est accélérée, avec des mesures pour éradiquer les “passoires” thermiques d’ici 2028. D’ici un an, les propriétaires ne pourront plus augmenter le loyer de ces logements classés F et G lors du renouvellement du bail ou de la remise en location. À partir de 2028, il sera interdit de mettre en location ces logements. Pour faciliter la rénovation énergétique des immeubles en copropriété, les syndics devront adopter un plan pluriannuel de travaux dédié à la rénovation énergétique et provisionner les dépenses correspondantes dans le fonds de travaux de la copropriété.

Parallèlement, un objectif de division par deux du rythme d’artificialisation des sols sur les dix prochaines années par rapport à la décennie précédente, est inscrit dans la loi (incluant la définition de l’artificialisation). Cet objectif sera décliné dans les territoires. Un principe général d’interdiction de création de nouvelles surfaces commerciales qui entraîneraient une artificialisation des sols est posé.

Pour sanctuariser les zones naturelles protégées et sensibles, l’objectif de 30% d’aires protégées est fixé dans la loi. Des mesures visant à permettre aux collectivités locales d’adapter leurs territoires côtiers au recul du trait de côte seront prises par ordonnance.

Renforcer les sanctions en cas d’atteintes à l’environnement

Le projet de loi durcit les sanctions pénales en cas d’atteinte à l’environnement.
Un délit général de pollution de l’eau et de l’air est créé, avec notamment la qualification “d’écocide” lorsque les faits ayant conduit à des dégâts graves et durables à l’environnement sont commis de manière intentionnelle (jusqu’à dix ans d’emprisonnement et 4.5 millions d’euros d’amende).

Les autres textes qui mettent en oeuvre les propositions de la CCC

Ce projet de loi complète les mesures budgétaires consacrées par le plan France Relance et par la loi de finances pour 2021 pour la transition écologique et les mesures sur la justice environnementale contenues dans la loi du 24 décembre 2020 (création de juridictions spécialisées et de conventions judiciaires d’intérêt public- CJIP). Il s’inscrit également aux côtés du projet de loi constitutionnelle intégrant à l’article 1er de la Constitution la préservation de l’environnement et des premières mesures réglementaires actées lors du Conseil écologique de juillet 2020 (comme l’interdiction de l’installation de chaudières au fioul).

La convention citoyenne pour le climat (CCC) s’est réunie une dernière fois et a  a donné la note très sévère de 2, 5 sur 10 au gouvernement. Pourquoi ?

La Convention a un site officiel : https://www.conventioncitoyennepourleclimat.fr/

On peut télécharger le rapport final et les 150 propositions de la Convention.

On peut télécharger le rapport final de la CCC sur les réponses apportées par le projet de loi : https://www.conventioncitoyennepourleclimat.fr/wp-content/uploads/2021/03/CCC-rapport_Session8_GR-1.pdf

Source : Info TV5 Monde du 3 Mars 2021 

Sandrine F : Cette note de 2,5 correspond au sentiment des citoyens, sur les mesures qui n’ont pas été prises, prises en partie ou amoindries.

Nous sommes à 3,3 sur 10 pour la prise en compte des propositions de la convention citoyenne pour le climat. Elle traduit bien sûr une déception, un manque de confiance mais aussi un manque de cohérence du gouvernement.

Nous avons surtout été très déçus par l’écocide. Faire de l’écocide un délit alors que nous voulions en faire un crime, cela a choqué et déçu beaucoup de personnes (ndlr, grave atteinte portée à l’environnement, entraînant des dommages majeurs à un ou plusieurs écosystèmes). Nous avions beaucoup travaillé sur ce sujet, qui est très important.

Le premier jour de la convention, nous avons rencontré la climatologue Mme Masson-Delmotte. Cela a été pour nous comme un électrochoc quand elle nous a fait l’état des lieux de la planète, du climat.

Pour ma part, je participais au groupe “Produire et travailler” : recyclage des déchets, bilan carbone, baisse du transport aérien… Nous avons proposé une réforme pour la gestion des emplois et des compétences avec des moyens pour favoriser des filières qui vont être dominantes dans les prochaines années, mais nous n’avons pas été entendus. J’ai été déçue comme beaucoup d’entre nous.

TV5MONDE : Est-ce que les recommandations de la convention vont être contraignantes pour le gouvernement ? Quelles vont être les prochaines étapes ?

Sandrine F : Maintenant c’est aux parlementaires de gérer le dossier, de débattre des lois fin mars. Notre travail est fini, c’était la dernière session. C’est vraiment dommage parce que nous avions beaucoup d’espoirs, nous étions portés, nous ne pensions pas que nos propositions seraient autant peu prises en considération.

L’enjeu est tellement important et grave. Nous n’arriverons jamais aux 40 % et encore moins aux 55 % de la diminution des GES (gaz à effet de serre). Notre postulat de départ, c’était de baisser de 40 % les GES d’ici à 2030, mais nous n’y arriverons pas et cela est dramatique.

TV5MONDE : Pensez-vous que les choses peuvent changer, qu’il peut y avoir une prise de conscience ?

Sandrine F : Je pense sincèrement qu’il y a déjà une prise de conscience. Les jeunes avaient commencé à manifester avant l’apparition du Covid-19. Le gouvernement avait bien anticipé les choses, il avait besoin d’une caution verte avant les élections municipales. Il a créé le CCC juste après la crise des gilets jaunes, pour justifier son inaction par rapport au climat. Nous aimerions demander au gouvernement de se réveiller, ne serait-ce que de prendre conscience de l’enjeu.

TV5MONDE : Comment avez-vous vécu cette expérience ?

Sandrine F : C’est l’une des expériences les plus enrichissantes que j’ai vécue. Au départ, je ne connaissais pas grand-chose au climat, je peux le dire, je n’étais pas une militante écolo. Aujourd’hui, je ne le suis pas non plus, mais j’ai de réelles convictions. J’ai appris énormément de choses. Je pense que refaire des conventions comme celle-ci serait une bonne chose pour éveiller les consciences. Je pense que les citoyens ne demandent que cela.

La Convention citoyenne pour le climat pense avoir été utile

Source La Croix du lundi 1 Mars 2021

Au terme de seize mois de travail, la Convention a tenu dimanche 28 février son ultime réunion. Cent vingt-neuf membres ont noté sévèrement le gouvernement, pour s’être insuffisamment emparé de son rapport, mais ils jugent bénéfique l’expérience démocratique.

« Le compte n’y est pas pour atteindre une réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030. Mais notre message n’est pas conflictuel, c’est un message pour entraîner tous les Français. » Peu avant 13 heures, dimanche 28 février, Hubert est le dernier membre de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) à s’exprimer. Après seize mois d’auditions, de débats, de rédaction des 149 propositions, sonne l’heure des dernières paroles.

Les mots d’Hubert lors de cette ultime réunion résument l’état d’esprit des participants, partagés entre une déception par rapport aux annonces de l’exécutif et la conviction qu’un tournant historique a été pris avec cette première expérience de démocratie participative.

La matinée a été consacrée à une évaluation de la « prise en compte » des propositions par les autorités. Alors que le gouvernement comptabilise 75 mesures mises en œuvre et 71 en voie de l’être, dans le plan de relance et le budget, et une quarantaine dans le projet de loi climat et résilience, les membres de la CCC sont, logiquement, bien plus sévères. 129 participants (sur 150) ont évalué sur une échelle de 0 à 10 l’action gouvernementale dans cinq grands domaines.

La thématique « se loger » (dont la rénovation thermique obligatoire) a obtenu une moyenne de 3,4, et « consommer » (limiter le suremballage, etc.) de 4. Trois autres thématiques décrochent 3,7 : « produire et travailler » (favoriser le recyclage, etc.), « se nourrir » (réglementer les additifs, etc.) et « se déplacer » (limiter les effets nocifs du transport aérien, etc.).

Enfin, les propositions sur la gouvernance de la transition climatique (réforme de la Constitution, etc.) enregistrent un score de 4,1. La mesure qui vise à introduire la lutte contre le changement climatique dans le texte fondamental est l’une des rares à dépasser la moyenne (6,1).

Dans l’après-midi, les participants ont réalisé une évaluation plus globale. S’ils ne croient pas que les propositions reprises par le gouvernement permettront de se rapprocher de l’objectif de réduction de 40 % (2,5), ils estiment que la CCC a été utile (6) et que le recours à des conventions citoyennes sera à l’avenir de nature à améliorer la vie démocratique (7,7).

Un rapport conclusif était attendu dimanche soir, avec une ou plusieurs tribunes de participants. La balle est maintenant dans le camp des parlementaires. À l’Assemblée, la commission spéciale a commencé ses travaux le 16 février par des auditions. Après l’invitation du Haut Conseil pour le climat à « rectifier le tir », les députés ont la possibilité d’améliorer le texte par le dépôt d’amendements

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