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Sociologie de Fontenay aux Roses à travers les aides sociales et les impôts

Monsieur Candide : Fontenay a connu dans les années 2000, par volonté politique voire électorale, une montée très significative de son parc de logements sociaux, particulièrement en 2010. Quelles en sont les conséquences sociales ?

Rappelons l’évolution des villes de l’ex-agglomération Sud-de-Seine :

(Cliquez sur les tableau pour le voir en plus grand)

A Fontenay, entre 2005 et 2020, le nombre de logements sociaux est ainsi passé de 2.435 à 4.458 (+2.023) et le taux de logements sociaux (dit taux SRU) de 24.11 à 43.46%.

Cette évolution à la hausse s’est effectuée sans création d’un office municipal de logements sociaux (tel Clamart-Habitat, Chatillon-Habitat, …) et la Ville a ainsi, progressivement, perdu son pouvoir d’attribution de logements sociaux :

  • Du fait qu’elle n’était pas propriétaire desdits logements sociaux sur la Commune,
  • Du fait de la mainmise progressive du préfet sur la majorité des attributions,
  • Du fait des autres réservataires qui affectent, en leurs logements, les candidats de leur choix (sauf pression ponctuelle, amicale de la Ville à leur faire choisir un Fontenaisien).

Monsieur Candide : avez-vous des chiffres sur ces attributions ?

Le tableau ci-dessous, source DRILH (Direction Régionale Interdépartementale du Logement et de l’Habitat), indique plusieurs chiffres intéressants en matière d’attributions :

  • Le nombre d’attributions de logements sociaux, annuellement, varie entre 220 et 250 (sauf en 2018 avec 152) pour 1.200 demandeurs inscrits. Le délai d’attente s’établit ainsi à 5-6 ans et à beaucoup plus pour les non-prioritaires.
  • Sur ce total, les affectations sous contrôle de la Ville varient, de fait, entre 28 et 48.
  • Le pourcentage attribué par la Ville en 2019 s’établit ainsi à 14.8% (33/223 (tableau : sous rubriques « collectivités locales ») mais ce pourcentage doit lui-même inclure 25% de demandeurs obligatoirement prioritaires et qui ne sont pas, le plus souvent, d’origine fontenaisienne.
  • Sur le total des attributions, en 2019, le nombre global de locataires prioritaires, tous réservataires compris, représente 56 cas, soit 25.1% des 223 attributions (et 75.7% des « objectifs » donnés par la préfecture).

Les affectations de locataires prioritaires sont souhaitables car il faut résoudre le problème du logement des personnes économiquement faibles ou mal logés mais un taux de 43% de logements sociaux avec une affectation telle que résumée ici, conduit à l’évolution à la baisse continuelle de la situation économique moyenne de la population fontenaisienne. Cette évolution, année après année, est, à terme, problématique si rien ne vient en compensation. (Quand cet aspect est ignoré des gens qui parlent « urbanisme » et construction ou, plutôt, blocage des constructions, à Fontenay, on sait qui parle et que cet aspect, comme d’autres, est ignoré !).

Fontenay connait ainsi 4.500 logements sociaux pour un niveau d’affectations directes par la Mairie de 30 à 50 familles fontenaisiennes par an sur environ 12.000 familles présentes dans la Ville et 2.000 demandeurs (pas tous, cependant, de Fontenay). Quel échec !

Le Service Logement doit aller quémander à des Réservataires autres, dont les bailleurs eux-mêmes, de bien vouloir accepter des Fontenaisiens sur leur propre contingent. Pourquoi ne pas avoir créé un office HLM municipal en 2010 ou pris une participation au capital de Clamart-Habitat alors que les deux maires étaient de même couleur politique ? Cette solution aurait éventuellement permis une meilleure maîtrise par la Ville ! Quelle irresponsabilité de l’équipe municipale en charge à cette époque !

Monsieur Candide : Quels impacts sur la population de Fontenay ?

L’évolution en conséquence du revenu médian de Fontenay et la comparaison avec les villes de VSGP sont significatives de cette dérive :

Si on donne la valeur 100 au revenu médian du millésime 2013 de chaque ville, cet indice tombe à 99.3 à Fontenay en millésime 2018, seule ville en baisse, alors qu’il s’établit, en moyenne, à 107 pour l’ensemble des villes étudiées.

Cette diminution ne correspond pas à une approche « de gauche » soutenue par l’équipe aux affaires avant 2014 car les deux villes communistes de Bagneux et Malakoff ont connu des hausses de revenus très positives.

En clair, le revenu médian de Fontenay baisse de -0.7% quand celui des autres villes augmente de 7.3%. Dérive.

Monsieur Candide : la CAF, Caisse des Allocations Familiales, confirme-t-elle ces constats de l’Insee ?

Absolument ! CAF et INSEE font les mêmes constats ! Regardons dans le détail.

Impact du développement des familles monoparentales :

En 2020, les familles pauvres soutenues par la CAF sont constituées à hauteur de 31.5% de familles monoparentales (contre 28.5% en 2009).  Dérive.

En 2022, à Fontenay comme partout en France, la pauvreté ne résulte pas tant d’un niveau de salaire faible que d’une structure familiale se caractérisant, principalement, par :

  • L’éclatement des couples
  • Le nombre de familles monoparentales.
  • Le veuvage

Fontenay : Impact du développement de l’inégalité :

A Fontenay, le problème n’est pas tant la hausse des 10% les plus riches (+1.3%/an entre 2014 et 2018) que la baisse absolue des revenus des plus pauvres (-0,3%/an), l’évolution de la structure des familles vue ci-dessus, en étant la cause majeure. Dérive.

Fontenay : familles à bas revenus :

Le nombre des familles à bas revenus a augmenté de 33.2% entre 2009 et 2020, passant de 895 cas à 1.192 (un dixième des familles fontenaisiennes). Dérive.

Fontenay : Taux de pauvreté :

Le taux de pauvreté est passé de 9.9% en 2014 de la population à 11% en 2018. Dérive.

La pauvreté relève de plus en plus des personnes seules et des familles monoparentales :

Rappelons que le bâti de Fontenay, ancien et majoritairement des années 1950-60, ne prend pas en compte cette évolution avec augmentation de familles autres que papa-maman-deux-enfants. En 1950-60, rien n’a été construit pour familles monoparentales, veufs,Ce qui pose ainsi le problème de la structure du bâti.

 Fontenay : Bénéficiaires du RSA :

Le RSA est un complément de revenu pour les travailleurs pauvres et un minimum social pour ceux qui ne travaillent pas. Il est appelé à favoriser le retour à l’emploi des personnes recevant ce minimum social. …

Conditions d’attribution :

  • Habiter en France de manière stable, plus de 6 mois par an
  • Être de nationalité française, citoyen de l’Espace Économique Européen (EEE), Suisse tout en vous justifiant d’un titre de séjour, ou enfin être ressortissant d’un autre pays et résider en France depuis 5 ans.
  • Disposer de ressources mensuelles moyennes ne dépassant pas un certain seuil.
  • Avoir fait valoir ses droits concernant les autres prestations sociales (comme l’allocation chômage, la retraite, …).

Autrement dit, un demandeur ne peut percevoir le RSA que s’il n’a pas ou plus le droit à une autre aide, par exemple en fin de période d’indemnisation de chômage.

Sur la base de l’année 2020, selon les chiffres de la CAF (Caisse Allocation Familiale), le nombre de bénéficiaires du RSA a augmenté passant de 426 à 468 bénéficiaires se répartissant comme suit :

Quasiment un tiers des bénéficiaires du RSA sont des familles monoparentales. Dérive.

Fontenay : APL- Aide personnalisée au Logement :

L’APL est une aide financière accordée par la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) pour permettre aux bénéficiaires de réduire le montant de leur loyer ou de leur mensualité de remboursement de prêt immobilier.

L’aide ne peut concerner qu’une résidence principale qui doit être occupée au moins huit mois par an par le bénéficiaire ou son conjoint (ou concubin), ou par une personne à charge.

Les ressources propres des locataires ne doivent pas excéder certains plafonds, la Caf calculant le droit et le montant de la prestation relative au logement selon différents éléments :

  • Le nombre d’enfants et des autres personnes à charge ;
  • Le lieu de résidence ;
  • Le montant du loyer ou pour l’aide personnalisée au logement de la mensualité de remboursement de prêts (dans la limite d’un certain plafond) ;
  • Les ressources du foyer des 12 derniers mois.

Dans le cadre du Territoire VSGP, Fontenay se situe en troisième rang du nombre de personnes bénéficiant de l’APL (en % de la population) derrière Bagneux et Malakoff. Dérive.

Fontenay : Autres prestations sociales :

Le nombre de Fontenaisiens bénéficiaires de prestations est en hausse sensible, y compris de 46.1% pour la prestation « Minimum vieillesse » : Dérive.

Fontenay : Taux d’effort pour payer les loyers :

Nous mesurons ici l’effort à connaître par les locataires fontenaisiens pour payer leurs loyers sociaux ou privés, effort mesuré en pourcentage du revenu.

Enseignements de ce tableau spécifique aux allocataires de la Caf :

-Logements sociaux : Pour 2020, les allocataires en logements sociaux de la CAF,  représentent 900 familles sur environ 4.500 locataires sociaux  (20%). Le coût des loyers (après APL)  en % des revenus passe, pour la majorité du segment 0-9% (42.77%) en 2012 au segment 10-19% (43.2%) en 2020.

En clair, la population des logements sociaux s’appauvrit et la part du loyer dans leurs revenus augmenten sensiblement. Cette part, en 2020, reste cependant inférieure à 19% pour 75% des intéressés (31.8+43.2).

Logements privés : Les allocataires en logements privés connaissent majoritairement un loyer représentant plus de 40% du revenu total, le % des familles concernées passant de 30.8 à 44.9% des allocataires. Cette situation s’explique, en partie, par le fait que certains logements privés sont, de fait, des logements sociaux sous apparence de statut privé (nous n’en préciserons pas, ici,  les adresses).

En synthèse, l’éclatement des familles, le vieillissement des populations, l’évolution à la baisse du revenu médian des Fontenaisiens et la hausse des loyers font que la part des revenus affectés aux loyers (dit « taux d’effort ») augmente pour les deux populations logements-sociaux et logements-privés (du moins pour la population suivie par la CAF) … Dérive.

Le « reste à vivre » après paiement du loyer est donc en baisse, phénomène qui explique la stagnation du commerce à Fontenay (voir notre étude sur ce sujet en article futur). .

Fontenay : Déclarations fiscales (IRPP)

L’analyse de la fiscalité et de l’IRPP (Impôts sur le Revenu des Personnes Physiques) au niveau de VSGP montre que Fontenay, globalement, se situe en quatrième rang du classement (1er = la ville la plus pauvre), derrière Bagneux, Malakoff et Chatenay.

Il est certain que l’évolution de Chatenay et, spécifiquement, la construction de centaines d’immeubles privés face au Parc de Sceaux vont augmenter le niveau économique moyen de cette ville qui passera devant Fontenay dont le niveau de construction reste lilliputien : 3 immeubles livrés en 8 ans !

Fontenay : cohésion sociale :

Mesure de la cohérence sociale par rapprochement du « rang » de chaque ville en population « riche » et population « pauvre » :

Notre approche permet de constater que Fontenay regroupe un taux significatif de gens en situation économique faible (4eme rang) et se situe dans la moyenne basse pour attirer les « riches » (9rmr rang). Au total, la population moyenne (au 5eme rang) reste de niveau économique limité avec peu de « riches » et une concentration de « pauvres ». Le problème étant moins le niveau absolu que la dérive.

Déclaration des couples faites en commun ou de manière séparée :

L’aspect décrit ici est significatif : certains couples, pour payer moins d’impôts pensent opportun de ne pas déclarer leurs revenus conjointement, par « foyer » mais séparément. Cette approche permet de minorer l’aspect progressif de l’impôt. Au niveau VSGP, le ratio de ces « optimisateurs » est élevé variant de 16.9% dans la ville bourgeoise de Sceaux à 36.1% à Bagneux, l’écart entre ces deux villes montrant que cette approche constitue plus la conséquence fiscale d’une certaine pauvreté qu’une recherche d’optimisation pour des hauts-revenus ou de lutte « féministe » de femmes ne voulant pas cumuler leurs revenus avec celui de « Monsieur ».

Fontenay avec 28.1% des foyers retenant cette approche se situe au 5ème rang derrière Bagneux, Clamart, Chatillon et Chatenay.

On notera que cette approche de déclaration séparée est légale tant que les deux conjoints ne sont pas mariés (en opposition avec l’histoire fiscale qui regroupait les personnes sous un même toit, d’où le vocabulaire de « foyer » fiscal). De là à proposer aux gens mariés de divorcer pour optimiser leur fiscalité, ….

Conclusion.

La maîtrise de la structure de la population de Fontenay, l’action politique, la relance du commerce, le développement de la culture, … doivent prendre fondamentalement ces aspects : en conséquence des opérations menées en 2010, opération Icade de sinistre mémoire, Fontenay baisse, se paupérise, s’éloigne sociologiquement de ses voisines.

Le problème n’est pas d’en rechercher les responsables et nous en connaissons les causes.

Il faut maintenant agir, accélérer et, surtout, arrêter cette approche de « Fontenay-Village », concept irréfléchi relevant de la boboïsation de certains, concept qui laisse supposer que tout va bien. Il faut restructurer la Ville !

Jean-Michel Durand

Ancien maire-adjoint aux Finances

Et aux Logements sociaux 2014-2020.

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