Suite à la décision du Conseil constitutionnel d’autoriser la mise en route d’une procédure de Référendum d’Initiative Partagée (RIP) à propos de la vente d’ADP, ci-joint un courrier envoyé par un Fontenaisien à son député en février, qui discute le fond de l’affaire :
Monsieur notre député,
Je pense que ce n’est pas une bonne idée que de vendre ADP à une société privée. Ayant passé 40 ans dans l’industrie
aéronautique comme ingénieur et cadre supérieur, je me permets de vous donner un avis.
1. ADP, 1er exploitant mondial d’aéroport (Les Echos du 15 février), est une entreprise d’importance vitale pour le pays: c’est une
clef du tourisme pour la ville de Paris et la base principale d’Air France. La gestion des créneaux de vols et des taxes
d’atterrissage, bien sûr avec la DGAC, sont des éléments critiques pour Air France. La fin de l’A380 décidée par Airbus est une
illustration de cette bagarre sur les créneaux: si Emirates, client principal pour l’A380, a décidé d’annuler un certain nombre de
commandes pour cet avion, c’est très certainement parce que l’Etat lui a refusé des nouveaux créneaux en France, bien sûr à la
demande d’Air France et de son nouveau patron. Ce que ne dit plus la presse bien sûr!
2. ATP va devoir se développer encore dans les années à venir. On parle actuellement de la construction d’une nouvelle
aérogare, qui suscite déjà des polémiques avec les riverains. Il paraît évident que l’opinion sera beaucoup moins encline à
autoriser cette construction au bénéfice d’une société privée, plutôt qu’a un opérateur public. Voir ce qui s’est passé à Notre
Dame des Landes. Par ailleurs ces extensions sont un facteur primordial de développement comme on peut le constater avec
Londres Heathrow, bloqué dans son expansion à deux pistes par les riverains. Pour info, CDG dispose de quatre pistes
parallèles. On peut aussi noter qu’Heathrow est la destination la plus importante des A380. Et pourquoi donc?
3. Je n’aurais pas la méchanceté de rappeler l’exemple pitoyable bien connu des négociations avec les autoroutes. Négociations
dans lesquelles Emmanuel Macron lui-même s’est fait piéger avec Ségolène en acceptant des prolongations déraisonnables…
On peut aussi citer aussi le pataquès de l’aéroport de Toulouse dans lequel un gouvernement avait promis la majorité à terme à
un chinois, promesse qu’heureusement un autre gouvernement a refusé d’honorer. Ce qui a conduit ledit chinois à sortir … avec
une belle plus-value!
4. La réalité économique fait qu’aucune entreprise privée n’est capable de planifier des investissements à aussi long terme (on
parle de 60 ans) sauf exceptions évidemment (mines, énergie). Pour des projets de très long terme, seul l’État a la capacité à
prendre le risque, parce qu’il dispose des moyens de changer le contexte. L’Etat est aussi son propre assureur. Et donc dans une
négociation entre une entreprise privée et l’État sur des échéances aussi longues, la société privée va mettre – pour légitimement
défendre son intérêt et prendre des marges pour les aléas – tellement de garde-fous et de protections que l’État ne pourra jamais
s’y retrouver. Toutes les clauses de revoyure périodique et de pression sur les prix que l’on peut imaginer n’ont aucune chance de
permettre de conclure un deal. Il ne faut pas oublier que dans l’entreprise privée il y a des comptes à rendre, et que nos
fonctionnaires et nos politiques changent suffisamment rapidement pour ne pas avoir à assumer les décisions auxquelles ils ont
contribué. En ce sens, ils ne peuvent pas être vraiment accountable. Cela n’enlève rien à leur qualité, ni à leur génie à inventer
des moutons à cinq pattes pour convaincre leurs ministres. Hélas!
5. Il s’agit d’une promesse de campagne… Donc c’est sacré! On peut voir cette promesse de deux façons. D’un côté, il y a le
souci de donner à une entreprise française du BTP majeure une assise financière avec des ressources stables et prévisibles. En
quelque sorte il s’agit – et c’est positif – de la renforcer dans le concurrence internationale. De l’autre on peut imaginer la volonté
de dédommager VINCI du fiasco de Notre Dame des Landes… Mais au fait, la limitation à 80 km/h était-elle une promesse de
campagne?
Je me tiens à votre disposition pour tout complément.
Cordialement.
Michel Bayet
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